La facilitation graphique n’a pas son pareil pour retenir l’attention et faciliter la compréhension. Juliette Taka, UI Designer chez Orange, autrice de BD et ex-Dev, nous explique pourquoi et comment elle sketchote sur des sujets scientifiques ardus.
Avez-vous déjà assisté à une conférence durant laquelle l’orateur enchaîne des diapositives surchargées de texte ? Et si n’importe quel sujet pouvait devenir intéressant… ou au moins un peu plus engageant avec une petite touche visuelle et créative ?
Je suis UI Designer et autrice de bandes dessinées, avec en prime un background technique : ingénieure multimédia de formation. J’ai été développeuse web et je m’implique dans la communauté open source. J’ai vite bifurqué vers le design, mais j’aime garder un pied dans la technique. C’est donc assez naturellement que je me suis formée au sketchnote, cette technique de prise de note visuelle qui permet de transcrire n’importe quel sujet sous forme de prise de notes simples et d’illustrations didactiques. Même des mathématiques ou de l’informatique !
Par exemple, prenons cette jolie formule de Blinn-Phong, un modèle de traitement d’image 3D utilisé pour simuler l’apparence de surfaces sous différents éclairages.
Pour présenter cette formule à des étudiants, je commencerais par cette forme, plus ludique et mémorisable :
Certes, l’équation ne devient pas tout à fait limpide pour les allergiques à la physique mais tout de même : entre les deux approches, laquelle préférez-vous ? Une grande partie de mes sketchnotes s’articulent autour de projets complexes. Le plus intéressant pour moi est de travailler sur la vulgarisation scientifique. La représentation visuelle permet de mieux comprendre et assimiler les concepts. Pour celles et ceux que la science intimide, la facilitation graphique aide à dédramatiser.
Mais l’intérêt du sketchnote dépasse largement la vulgarisation. Il peut être utilisé quel que soit le sujet. Pour prendre des notes en réunion ou lors de conférences, conservé pour soi ou présenté à d’autres, en live ou en différé. Dans le cas d’une prise de note dessinée de réunion (de la capture d’idées en direct sous les yeux des participants), on parle plutôt de “scribing”.
Qu’il s’agisse de sketchnote ou de scribing, la facilitation graphique favorise le dialogue et les réflexions collectives grâce à une base visuelle commune. Les propos échangés ou les productions du groupe sont mis en valeur, l’intelligence collaborative est stimulée, la mémorisation facilitée.
Un sketchnote peut aussi être standalone, créé pour être diffusé sur les réseaux sociaux comme une infographie explicative ou pour illustrer un article.
Il n’est pas nécessaire de savoir dessiner pour faire de la facilitation graphique. L’important est surtout d’être capable d’écouter activement, et d’avoir un excellent esprit de synthèse. Dans un discours, toutes les informations ne sont pas à retenir. Souvent, elles sont délivrées avec une hiérarchie spécifique qui suit une temporalité. En remettant à plat un discours sur un support visuel, on choisit de n’afficher que les informations essentielles, structurées et organisées pour être comprises d’un coup d’œil.
Certaines personnes apprécieront de dessiner des pictogrammes pour ponctuer les mots clefs. Mais pour réaliser un bon sketchnote, il suffit de savoir reproduire les formes de bases que l’on peut trouver sur Powerpoint : ligne, cercle, carré… En revanche, savoir tracer des mots lisibles est primordial !
Il vaut mieux avoir un ensemble cohérent, hiérarchisé et organisé qu’un trait graphique très élaboré. Bien sûr, le dessin ajoute une touche personnelle agréable pour le spectateur, mais il n’est pas obligatoire. C’est au bon vouloir du sketchnoteur ! Quelques traits et les bonnes couleurs suffisent à guider le regard.
Si la réalisation de dessins (après tout, dans sketchnote, il y a sketch) vous attire, vous pouvez vous créer une bibliothèque visuelle de formes et pictogrammes appris par cœur, à réutiliser selon vos envies. Voire, encore plus pertinent : une bibliothèque recensant différentes méthodes pour présenter un ensemble d’informations !
Dessiner en direct peut être terriblement intimidant. Avant de voir plus grand, il vaut mieux pratiquer d’abord en petit comité avec des gens parmi lesquels on est à l’aise.
Afin de retranscrire au mieux ce qui se dit, il faut beaucoup travailler son écoute active et sa concentration. L’objectif est de capter les informations essentielles et de laisser de côté tout ce qui est anecdotique. Finalement, sur une conférence ou une réunion d’une heure, il n’y a pas énormément de choses à écrire si l’on va à l’essentiel. On utilise les moments où l’orateur cite des exemples ou digresse sur des sujets annexes pour réfléchir à une mise en forme, à des dessins explicatifs ou mettre de la couleur. Dans le cas d’un dessin en live, lors d’une conférence par exemple, je vous conseille de demander à l’orateur sa présentation ou une trame de son discours de manière à mieux se préparer.
Ensuite, il ne reste plus qu’à se lancer !
DESIGN EMOTIONNEL, SPRINT AGILE, FIGMA AVANCÉ, UI DESIGN